Les risques psychosociaux dans le cadre du télétravail
Le télétravail a été adopté comme une modalité d’exécution du contrat de travail depuis le début du confinement, pour les postes qui le permettent.
Le télétravail est défini par l’article L.1222-9 du Code du travail par « toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication. »
Le télétravail apparaît comme un mode d’exécution du contrat de travail qui permet d’assurer la continuité de l’activité professionnelle, dans les circonstances relatives à la crise sanitaire actuelle.
Néanmoins, il convient de faire état des dérives qui pourraient exister dans le cadre du télétravail afin de tenter, au mieux, de les éviter, ou au pire, de les combattre.
Dans ces dérives, nous pouvons notamment évoquer le risque d’une connexion permanente du salarié à ses outils de communication professionnel. Or, le droit à la déconnexion vient justement protéger le salarié de cette dérive.
Nous pouvons également évoquer le risque de surcharge de travail qui serait imposée au salarié. Or, le droit au repos quotidien et hebdomadaire vient protéger le salarié de cette éventuelle dérive.
Enfin, nous pouvons évoquer le risque d’un éventuel harcèlement managérial qui pourrait tout autant s’exercer en télétravail. Or, les dispositions visant l’interdiction de tout harcèlement moral viennent protéger le salarié de cette éventuelle dérive.
- Le droit à la déconnexion
Le droit à la déconnexion résulte de la loi du 8 août 2016 (n°2016-1088). Ce droit a notamment pour but de permettre la conciliation entre la vie professionnelle et la vie privée, et de lutter contre le risque de l’épuisement professionnel (burn-out).
Il s’agit du droit du salarié, de ne pas se connecter aux outils numériques et de ne pas être contacté par son employeur en dehors de son temps de travail.
Les modalités d’exercice de ce droit doivent être abordées lors de la négociation annuelle obligatoire (NAO), afin de figurer dans une charte d’entreprise, après avis du CSE, s’il existe.
Nous pouvons regretter qu’aucune sanction ne soit prévue si aucun accord n’en résulte.
Quoiqu’il en soit, il faut veiller à ce que le droit à la déconnexion soit respecté, et que nul ne puisse reprocher au salarié de ne pas répondre aux sollicitations par email ou par téléphone, de son employeur, en dehors de son temps de travail habituel.
L’autre dérive du télétravail peut consister en la surcharge du salarié. En effet, l’employeur pourrait être confronté à la difficulté de « doser » la charge de travail, pensant que le salarié disposerait de plus de temps libre à son domicile, et pourrait donc être tenté de vaquer davantage à ses occupations personnelles.
- Le droit au repos quotidien et hebdomadaire
Rappelons que les salariés doivent bénéficier d’un repos quotidien d’une durée minimale de 11 heures consécutives, conformément à l’article L.3131-1 du Code du travail.
Une convention ou accord collectif peut déroger à cette durée minimale dans certains cas, sans pouvoir réduire la durée du repos quotidien en dessous de 9 heures.
Aussi, rappelons que tout salarié doit bénéficier d’un repos hebdomadaire d’au moins 24 heures consécutives.
En somme, la charge de travail doit être régulée de telle sorte que le droit au repos du salarié soit respecté.
L’éloignement du salarié de son lieu de travail habituel peut également amener les managers à exercer une certaine pression, ces derniers n’étant pas nécessairement préparés à gérer un nombre important de salariés placés en télétravail simultanément.
- Le harcèlement managérial
Pour rappel, l’article L.1152-1 du Code du travail dispose qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
La jurisprudence décide que certaines méthodes de management sont à la source de faits de harcèlement moral.
La Cour de cassation a pu décider que les méthodes de gestion, mises en œuvre par un supérieur hiérarchique, se traduisant par la forme d’une pression continuelle, de reproches incessants ainsi que d’ordres et de contre-ordres dans l’intention de diviser l’équipe constitue des faits de harcèlement (Cass. Soc. 10 novembre 2009, n°07-45.321).
Ainsi le harcèlement moral managérial peut-être caractérisé par des méthodes de gestion ou de direction impactant tout ou partie du personnel, (Cass. Soc. 19 janvier 2011, n°09-67.463).
De la même façon, la surveillance excessive des faits et gestes du salarié et la vérification de chacun de ses travaux sont constitutives de faits de harcèlement moral (Cass. Soc. 21 septembre 2011,n°10-13.880):
Ainsi, il apparaît que l’organisation de réunions virtuelles à outrance ou l’obligation inhabituelle d’établir un rapport d’activité de façon démesurée pourraient entrer dans cette case, s’ajoutant évidemment à d’autres circonstances, au cas par cas.
C’est pourquoi le télétravail doit être encadré par un accord collectif, une charte ou par un accord entre les parties. Ceci permettrait alors de prévoir notamment les modalités de contrôle du temps de travail ou de la régulation de la charge de travail.
Cela permettrait également de déterminer les plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail.
Enfin, il sera souligné que l’accident survenu sur le lieu est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail, conformément de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale.
En conclusion, les risques psychosociaux qui existent au sein d’une entreprise peuvent de toute évidence trouver place dans le cadre du télétravail. Il convient d’y prêter une attention particulière d’autant plus que la crise sanitaire actuelle accentuerait la vulnérabilité des plus fragiles.